A Beautiful Day.

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A Beautiful Day.
(You were never really Here).

1h3o.
France, Royaume-Uni.
RĂ©alisatrice : Lynne Ramsay.

SN : 8 Novembre 2o17.
Vu en salle le Mardi 14 Novembre 2o17, VOST.

đź“– (eng). Jonathan Ames, You were never really here, London, Pushkin Press, 2o16 (Prem. Ă©d. 2o13). 96p.
📖 (fr). Jonathan Ames (aut.), Jean-Paul Gratias (trad.), Tu n’as jamais vraiment été là, Paris, Folio, 2o15 (Prem. éd. 2o13). 96p.


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Je vais maintenant te parler d’un film coup de poing, et un peu marteau. (Loliloul mais qu’est-ce qu’elle est drôle !).
Bien que ses précédentes réalisations errent dans mes interminables listes de films à voir, je ne connais pas le boulot de Lynne Ramsay. Mais ce que j’ai eu l’occasion de découvrir en salle avec A Beautiful Day m’a fait dire qu’il était temps de remédier à tout celà, et je vais tenter de t’expliquer pourquoi.

Un des talents de ce film, c’est sa capacité à parler d’une chose que l’on ne nomme pas. C’est une prise de risque : en tant que spectateur on peut potentiellement décrocher dans la première partie du film, car on ignore pourquoi le protagoniste agit de telle ou telle manière. Mais perso, alors que j’avais pris soins de rester totalement hermétique à la problématique du scénario, j’ai laissé du temps à l’histoire pour qu’elle se mette en place. Et si je ne me suis pas égarée, c’est parce que j’ai de suite été intriguée par le protagoniste.
C’est ensuite que j’ai compris les enjeux de l’histoire, ce non-dit autour des faits a efficacement fait échos avec une problématique bien présente dans le monde réelle, et face à laquelle nombreux sont ceux qui portent des œillères.

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L’autre point qui a fait que je n’ai pas décroché, c’est l’image. A Beautiful Day fait preuve d’une esthétique à part entière. Couplé au fait qu’il y a pas mal d’aspects contemplatifs ou de scènes invitant à disséquer l’image, je te laisse imaginer le résultat. C’est visuellement pénétrant, mais c’est aussi oppressant, et en totale corrélation avec le propos. La profondeur de cet esthétisme vient appuyer la profondeur de l’histoire.

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Bon, sinon, on en parle de Joaquin Phoenix ?
Le gars a mérité sa palme cette année. Il joue ici un molosse à fleur de peau dont on ne sait rien ou peu. On ne sait presque rien de sa vie, et il n’est pas très bavard. (Le film ne fait pas grand usage de dialogue, une des raisons pour laquelle on l’a beaucoup comparé à Drive).

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On découvre son job, on digère quelques parcelles de son histoire à travers l’usage de flash back courts mais causants. Il y a quelque chose d’effrayant chez lui, mais aussi beaucoup d’intrigue, et on veut comprendre. C’est un molosse doublé d’un rouleau compresseur qui accompli sa tâche sans détour, mais on lui connait un côté tendre assez touchant, et on assiste à des moments de grande instabilité. Le mec est susceptible de démarrer au quart de tour, et si on ne met pas de mot sur son état (Borderline ? Peut-être une bonne piste…), on se familiarise avec ce qui le fait dérailler.

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Ce portrait mental est alimenté par ces fameux flash back. Ils viennent nous expliquer avec justesse pourquoi ça va forcément dérailler.

Tu assistes aussi Ă  cette scène de clĂ´ture, qui – personnellement – a fini de m’achever. Une sĂ©quence qui, dans tout ce qu’elle a d’hallucinogène, est incroyablement parlante. Paroxysme dans l’étude mentale du protagoniste : on a fini de pĂ©nĂ©trer son esprit, ce dernier est clairement dĂ©semparĂ©, paumĂ©, inapte.
Reste le goût d’un espoir incertain, porté par la gamine, mais rien n’est beau pour autant.

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Au-delà de l’image, de la trame et du mental, il y a bien d’autres choses. Ne serait-ce que la gamine qui, bien que je m’attendais à ce qu’elle soit plus présente, vient noircir le tableau par une attitude et cette froideur réaliste qui fait grincer tes dents.
Je ne connais pas l’actrice, mais le choix est vraiment judicieux. Un visage qui dégage une véritable pureté, comme c’est ironique. Comme c’est malaisant. Quant à la blancheur de sa peau et son regard de glace, ils apportent beaucoup à cette mort de l’enfance qui s’étale sous tes yeux.

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Pour finir, je vais te parler d’une autre scène très réussie, et qui selon moi en dit long sur le film.
Il s’agit de la scène où notre malabar débarque dans une maison afin d’en évacuer la gamine. Mais avant ça il doit, comme qui dirait, nettoyer la crasse.
Dans les faits, c’est une séquence très violente mentalement ET physiquement. D’autant plus pour les spectateurs retardataires qui n’auraient toujours pas compris dans quoi on s’embarque (sait-on jamais). Mais les coups portés contre les pourritures ne sont pas filmés frontalement, et il n’y a pas de prise de son. Pas de hurlements. Pas de bruits sourds. Mais un morceau classique qui vient briser tout ça. Oui Oui. Le contraste entre cette joyeuse mélodie et ce qu’il se passe sous tes yeux est grave, et il vient t’apaiser à peu près autant que l’idée de voir ces mecs claquer (ou pas).
(Si tu reconnais le morceau, pitié donne-moi son nom, je le connaissais déjà mais j’ai aucune mémoire musicale).
Bref, l’effet est rĂ©ussi. La scène est magnifique dans son inhumanitĂ©, elle se dĂ©ploie Ă  la manière d’une oeuvre d’art, et elle sublime une violence puissante et pourtant – j’insiste – non frontale.

Alors malgré les retours parfois négatifs que j’ai pu entendre ou lire au sujet d’A Beautiful Day, je t’incite vraiment à lui laisser sa chance. Il ne passera sans doute pas chez tout le monde, parce qu’il déstabilise, aborde ce qu’on occulte, et n’est pas fait pour être plaisant. Mais le scénario et le format en font une oeuvre à part que certains apprécieront beaucoup, j’en suis sûr. Et le duo phare vaut vraiment le détour.

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• Festival de Cannes 2o17. (Récompense (ex-aequo) ). Prix du Scénario.
• Festival de Cannes 2o17. (Récompense). Prix d’interprétation masculine.
• Festival de Cannes 2o17. (Nomination). Grand Prix.
• Festival de Cannes 2o17. (Nomination). Prix du Jury.
• Festival de Cannes 2o17. (Nomination). Cannes Soundtrack.
• Festival de Cannes 2o17. (Nomination). Prix de la Mise en Scène.
• Festival de Cannes 2o17. (Nomination). Prix Fipresci – CompĂ©tition officielle.


Bergamout
Mercredi 6 DĂ©cembre 2o17.
Catégorie « Septième Art ».

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